Avis sur la Révision du référentiel de gestion forestière FSC pour la France métropolitaine

L’association Environnement 92, créée en 1991, fédère 49 associations de protection de l’environnement des Hauts de Seine. Environnement 92 est agréé pour la protection de l’environnement et habilité au dialogue environnemental. Elle est affiliée à France Nature Environnement île de France.
Le présent avis ambitionne de fournir un éclairage sur l’impact des dérèglements climatiques et la perte de biodiversité des forêts sur la gestion forestière et leurs pratiques. Il vise spécifiquement le document Tableau de correspondance Revision referentielFSC- premire consultation.pdf, notamment les valeurs et impacts environnementaux (principe 6) et sur la mise en œuvre des activités de gestion (principe 10).

Valeurs et impacts environnementaux

Les impacts environnementaux relatifs au réchauffement climatique ne sont pas seulement les risques que posent le réchauffement climatique à l’exploitation forestière, mais aussi les effets positifs (séquestration de carbone) ou négatifs (surexploitation au-delà de l’accroissement naturel) des modes d’exploitation forestière sur la lutte contre le réchauffement climatique.
L’exploitation d’une forêt ne doit pas réduire la quantité de carbone qu’elle séquestre, mais l’augmenter en cette période jusqu’à 2050) critique pour la lutte contre le réchauffement climatique. Le GIEC recommande d’augmenter la séquestration carbone des forêts de 25%, ce qui demande d’augmenter la surface terrière autant que possible.
La certification FSC doit tenir compte de cette recommandation du GIEC en excluant toute certification de bois provenant de massifs forestiers où l’exploitation conduit à des prélèvements supérieurs à 75% de l’accroissement naturel).

Mise en œuvre des activités de gestion

Les objectifs d’adapter les sylvicultures et d’améliorer des indicateurs encadrant les pratiques de gestion « intensives » (coupes rases, limitation de l’usage des pesticides, protection des sols, extraction des rémanents) imposent de minimiser la surface de sol impactée par le passage d’engins pour récolter les produits forestiers tout en protégeant les valeurs environnementales.

En France, l’ONF dans son plan d’aménagement de la forêt de Meudon (2021-2040) pratique une distance de 24 m entre les cloisonnements. En Allemagne et en Suisse, cette distance est de 40m minimum.
Les référentiels FSC de l’Allemagne sont tout à fait applicables à la France. Il n’y a pas de raison pour qu’elles ne le soient pas ! Il est raisonnable de limiter les surfaces des dessertes et cloisonnements à une limite supérieure de 10% de la surface de la forêt et à espacer les cloisonnements à au-moins 40 m pour les raisons environnementales et sociétales suivantes:
  • Le tassement important de grandes surfaces du sol par les engins d’exploitation réduit l’espace boisé; il nuit à la biodiversité et à la vie du sol.
  • La lutte contre le réchauffement climatique : les cloisonnements de 4 m de large tous les 24 m adoptés par l’ONF détruisent beaucoup trop d’arbres qui ne font pas partie de l’objectif principal de récolte. Ces volumes de bois vivants détruits pour ces cloisonnements ne font pas généralement partie de l’objectif principal de l’exploitation. Ils sont utilisés comme bois-énergie. Ce bois-énergie est vendu avec l’appellation faussement écologique d’énergie renouvelable. Mais cette énergie si elle est renouvelable transforme très rapidement le carbone stocké dans le bois (ainsi que les racines mortes et les rémanents en forêt) en C02 émis dans l’atmosphère ce qui aggrave le réchauffement climatique. L’émission de C02 du bois brûlé est très importante. Pour la même énergie de chauffage, Elle est près de trois fois plus importante avec du bois qu’avec du gaz de ville et plus importante aussi qu’avec le fioul. Les années présentes jusqu’à 2050 sont cruciales pour éviter un emballement des températures sur terre. La forêt doit servir de puits de carbone en réduisant à son strict minimum l’exploitation forestière et en excluant des coupes tout ce qui diffère des objectifs principaux de l’exploitation. Le bois-énergie est à éliminer des produits forestiers.
  • La lutte contre la réduction de la biodiversité forestière : L’exposition à la lumière d’une importante part des sols forestiers nuit à la faune et la flore forestière
    ordinaire. Les écosystèmes de ce type de forêts ne sont pas les mêmes que les écosystèmes purement forestiers. L’essor de la biodiversité forestière est
    inversement proportionnel à l’intensité de l’exploitation. L’Indice de Biodiversité Potentielle (IBP) est un très bon indicateur de la gestion forestière. Il indique qu’une surface supérieure à 5 ou 6% de peuplements clairs ou de lisière nuit à la biodiversité forestière.
  • La pollution induite par le bois-énergie : Le bois-énergie est une énergie très polluante qui, bien que renouvelable, ne convient pas au chauffage dans les grandes métropoles qui concentrent l’essentiel de la population française. Plusieurs études ont montré que la pollution aux particules fines provoque la mort prématurée d’environ 48000 personnes par an dans le pays, dont environ 10 000 en région parisienne. La France a été rappelée à l’ordre de façon répétée par l’Union Européenne pour ses dépassements répétés des normes de pollution dans plusieurs métropoles urbaines. Elle a été lourdement condamnée récemment par la cour de justice européenne. La dernière étude sérieuse sur les sources de pollution, faite par AirParif en 2015, montre que la moitié de la pollution atmosphérique en région parisienne vient du chauffage urbain. Il y a une forte disproportion de la pollution aux particules fines PM10 et PM2,5 suivant le mode de chauffage. 85% de la pollution aux particules fines vient du chauffage au bois contre seulement 5% de l’énergie fournie d’après la dernière étude publiée par AirParif en 2015.
  • L’usage des forêts publiques par la population à des fins récréatives. Particulièrement pour les forêts urbaines, cette fonction doit primer sur la fonction économique. Le paysage résultant de cloisonnements rapprochés est une des sources de protestation les plus importantes de la population.
Enfin, pour respecter le critère 10 de gérer les activités associées à la récolte et à l’extraction des produits forestiers ligneux et non ligneux*, Environnement 92 soutient la conservation des arbres morts ou en décomposition sur pied et au sol ainsi que la limitation de l’extraction des menus bois à 7 cm sauf dans les situations exceptionnelles listées dans le Documents

Le 12 juillet 2022

Irène Nenner – Présidente d’Environnement 92 et de Chaville Environnement – Officier dans l’Ordre de la Légion d’Honneur

Jean-Claude Denard – Chargé de mission forêt, Environnement 92