Avis sur le projet « GREEN DOCK »

Le Port de Gennevilliers, zone économique avec des équipements aménagés en vue d’accueillir des activités logistiques, représente une opportunité pour l’implantation d’un entrepôt.

A l’échelle de l’île de France, le besoin de rapatrier l’activité logistique en petite Couronne n’est plus à démontrer.

En revanche, ce qui reste sans réponse, c’est le besoin de données concrètes qui justifierait le dimensionnement de GreenDock  (90 000 m2 dédiés à la logistique) : à ce jour, autant la justification de rapprocher l’activité logistique des consommateurs est parfaitement claire et acceptable, autant le gigantisme de l’entrepôt ne semble pas évident à comprendre.

 

De plus, la prise en compte de la zone Natura 2000 n’a pas été assez développée dans cette concertation.

En premier lieu, les documents fournis ne mentionnent pas d’études d’incidences envisagées pour la zone Natura 2000, ce qui est pour le moins incompréhensible..

Or ce point évoqué par toutes les associations et collectivités, n’a pas reçu en réponse d’éléments concrets de réflexion. On peut comprendre, que le recensement des espèces soit difficile du fait des migrations de certaines, de la rentrée en hibernations d’autres comme les chiroptères : pour autant, un plan méthodologique sur la faisabilité de cette étude avec ses contraintes aurait dû être présenté.

Dans les études relatives à la pollution lumineuse ou acoustique, le promoteur a lui-même identifié des nuisances pour la zone Natura 2000. Leur réduction a été peu évoquée en réunion du 12 octobre alors que ces points sont de première importance.

 

Pour rester sur le thème de la biodiversité, la pré-étude (incomplète) sur cette thématique, montre des efforts d’évitement ou de compensation des nuisances qui vont dans le bon sens mais sont insuffisants. Ces mesures doivent figurer comme ligne directrice dans toutes les phases de modifications du projet :

  • Renaturation de la berge Nord du projet
  • Choix d’une palette végétale locale, plantée en pleine terre,
  • Végétalisation plus importante de la façade du projet
  • Intégration de nichoirs destinés à l’avifaune et gîtes à chiroptères en phase travaux et d’exploitation

Par ailleurs, les panneaux solaires exigés par la loi Climat et Résilience tendent vers une utilisation intelligente du nouveau bâtiment même s’il n’est pas encore connu s’ils sont suffisamment dimensionnés pour alimenter tous les besoins en énergie. Ceci serait un objectif à atteindre compte tenu de la vigilance que nous devons tous apporter à notre consommation énergétique : les mégas constructions, comme les autres, doivent ponctionner un minimum dans la production électrique générale.

 

La part de trafic fluvial annoncée de la part du promoteur (15%) doit être un palier, non une finalité. Comme Goodman s’en réclame, être vertueux aujourd’hui, n’est plus seulement renaturer une parcelle ou construire une ferme urbaine, c’est aussi identifier les axes de progression d’une partie de ses activités pour aller dans le sens des exigences de la transition climatique et proposer des solutions.

 

Les chiffres de projection des émissions de gaz à effet de serre et de particules fines dues au trafic routier pour l’activité de Greendock ne seraient pas significatifs au regard des émissions à l’échelle du port, selon le prédiagostic livré à cette concertation Ceci peut s’expliquer par la présence de la A86 à proximité ainsi que par l’usage croissant de véhicules électriques (comme Goodman l’a également supposé en réunion). Ces « bons chiffrent » se basent sur une bonne conjecture mais ne constituent pas une assurance des bonnes pratiques.

Goodman est un groupe international désireux de construire l’un des plus gros entrepôts d’Île de France : il est en position aujourd’hui pour faire évoluer l’usage du fleuve à des fins logistiques, il doit se saisir de cette possibilité et la cultiver avec le Port…

Les acteurs publics (la préfecture, Voies Navigables de France …) peuvent également pousser vers cet engagement en exigeant l’augmentation de l’activité fluviale lors par exemple de l’établissement de l’arrêté préfectoral du site.

Concernant le transport ferré ma remarque est la même : l’arrivée d’un giga entrepôt sur le territoire du port doit donner une impulsion au redéveloppement de ce mode dans son enceinte.

 

Je ne développerai pas ici tous nos questionnements mais les principaux enjeux environnementaux qui n’ont pas été traités lors de cette consultation (ou trop rapidement) sont :

  • les risques industriels, notamment liés aux dangers présentés par le stockage de marchandises,
  • les risques d’inondation et de site et sols pollués
  • les consommations d’énergie et les déchets,
  • L’impact paysager ( très mal abordé…)

 

Ainsi, pour continuer sa réflexion sur le projet et mieux se positionner, Environnement 92 a besoin :

  • de la définition des mesures de compensation (évitement ou réduction ?) suite aux dérangements des espèces protégées déterminant la zone Natura 2000 (entre autres la gestion de la lumière artificielle nocturne à minimiser drastiquement pour ne pas perturber la faune terrestre et aquatique…)
  • de la présentation de l’insertion du projet dans son contexte paysager actuel et futur à partir de divers points de vue;
  • de l’évaluation plus précise, des risques de pollution des sols et des eaux, en précisant la gestion des eaux de ruissellement et de crue ;
  • du plan de traitement optimal des différents modes de transports à moyen et long terme, avec pour objectifs de mieux proportionner l’utilisation de la multi-modalité par le site, tant pour les marchandises que pour les agents du site (point non abordé mais il semble que les transport en commun du port ne soient pas suffisant à toutes heures)
  • de connaître la consommation d’énergie des futurs bâtiments et la part qui sera couverte par la production des panneaux photovoltaïques implantés sur les toitures ;

 

Ce projet est à la croisée d’une double exigence qui peuvent s’avérer contradictoires : porter des activités logistiques au plus proche des consommateurs mais également, limiter les nuisances induites. Compte tenu de toutes les remarques formulées, le Port, les acteurs publics et le promoteur doivent apporter des réponses dans la limite de ce qui est réellement acceptable.

Virginie Codina et Irène Nenner

Environnement 92