Par délibération du 28.09.2016, le conseil de territoire de Grand Paris Seine Ouest a prescrit l’élaboration d’un règlement local de publicité intercommunal, se substituant aux règlements communaux existants dans le but notamment de renouveler les mobiliers urbains de GPSO (5 villes sur 8). Le présent avis s’inscrit dans le cadre de la concertation citoyenne et institutionnelle avant finalisation d’un règlement d’ici au début de l’année 2019.
Sur la base des éléments présentés en réunion publique dans les différentes communes de GPSO, La fédération d’associations de protection de l’environnement « Environnement 92 » formule les observations suivantes :
Contexte législatif et réglementaire
Les règles applicables en matière de publicité extérieure sont fixées par le Règlement national de publicité (RNP). Le Maire ou, comme en l’occurrence, le Président de l’EPT GPSO ne peut s’en affranchir que dans un sens plus restrictif dans un objectif de renforcement de la protection de l’environnement et du cadre de vie. Dans les communes dotées d’un règlement local de publicité, le maire est seul compétent pour instruire les demandes d’autorisation concernant les bâches et dispositifs publicitaires de dimension exceptionnelle liés à des manifestations temporaires. La publicité à proximité des sites classés est soit interdite soit fortement restrictive.
Le projet de Règlement Local de publicité Intercommunal répond à une volonté de réduire et encadrer strictement l’affichage publicitaire (espaces publics et enseignes commerciales), en associant liberté d’expression et protection du cadre de vie. Ceci explique que la base législative de ce projet s’appuie sur la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement et la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine avec in fine des modifications du code de l’environnement.
Or ce projet est aussi concerné par
- La loi de transition Énergétique pour la croissance verte (17 Août 2015) fait état dans son article 188 relatif aux Plan Climat Air Énergie Territoriaux, de la maîtrise de la consommation énergétique de l’éclairage public et de ses nuisances lumineuses. Or les publicités lumineuses sont concernées par ces deux aspects.
- La loi du 8 Août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages appelle à nombre d’actions notamment pour protéger la biodiversité animale. Les études les plus récentes montrent le déclin brutal des insectes et aussi des oiseaux. La pollution lumineuse en est une des causes.
- Par ailleurs, la réglementation du Code de l’environnement régit déjà strictement la publicité extérieure ; mais on peut relever de multiples dérogations (produits du terroir, activités culturelles,manifestations temporaires) qui appellent une vigilance permanente. De plus, l’évolution des technologies notamment sur les écrans lumineux numériques produit des effets qui impactent plusieurs communes et rend obsolète la classification des enseignes temporaires uniquement régies par le Mairede la commune d’implantation. C’est le cas de l’écran de La Seine Musicale.
La publicité lumineuse numérique, danger imminent
Le développement des nouvelles technologies en matière d’écrans lumineux numérique, explose sous des formes les plus variées : fixes ou dynamiques, pilotables à distance avec des tailles de plus en plus grandes et une course au gigantisme semble sans limites.
Les avantages mis avant par les industriels pour ces écrans numériques cachent de sérieux inconvénients : atteinte à la santé physique et mentale, consommation énergétique excessive, source de pollution nocturne et de déchets toxiques, atteinte à la biodiversité animale.
- La lumière bleue émise par les LED « blancs » de ces panneaux affecte la qualité du sommeil en bloquant la sécrétion de la mélatonine. Ils représentent donc une nuisance pour la santé humaine. Dans le cas de l’écran géant de la Seine Musicale, la puissance émise est telle que les riverains sont obligés de se claquemurer derrière ses volets pour ne pas être incommodés par cette illumination continue de la courbe de la Seine. On voit ici que cet écran altère l’alternance jour/nuit indispensable pour le repos des humains. De plus, la dynamique des images de cet écran visibles des voies à grande circulation(RD7), attire l’attention des automobilistes, motoristes et cyclistes au point de provoquer des accidents. On comprend que les riverains et les passants considèrent cet écran comme une agression quotidienne.
- Les écrans avec des images mobiles attirent l’attention des individus exposés dans 78 % des cas et déclenchent une action dans 50 % des cas ». Il s’agit de manipulation mentale. Ceci aggrave le fait que nous baignons déjà dans la publicité dans notre vie quotidienne.
- Les écrans numériques LED consomment 7 à 13 fois plus d’énergie que des affichages lumineux traditionnels, mais les LED consomment 10 fois moins d’énergie que les Halogènes utilisés en rétro-éclairage de panneaux publicitaires. En partant du principe de fonctionnement de 12h/jour toute l’année, et selon que la consommation soit de 250W / m2 (source) ou de 780W / m2 (source : voir point n°26), un écran de 12 m2 consomme annuellement entre 3 kW et 9,36 kW.). Ces chiffres, pour l’écran de 800 m2 de la Seine Musicale, sont près de 70 fois plus élevés. Ces chiffres sont énormes !
- L’empreinte écologique de ces écrans numériques est plus forte que les afficheurs papier déroulants,contrairement à l’argumentation des industriels. Ceci provient des méthodes polluantes de recyclage des déchets notamment les métaux rares (indium, galium par exemple) dont les réserves s’épuisent.
- Comme pour l’éclairage public, les panneaux lumineux impactent fortement les comportements et la synchronisation biologique de nombreuses espèces animales puisque 30 % des vertébrés et 60 % des invertébrés sont nocturnes. La lumière artificielle ronge de plus en plus les zones d’obscurité naturelle et affecte de plus en plus la biodiversité des écosystèmes, surtout dans les zones urbanisées. Le cas le plus extrême est l’écran de la Seine Musicale qui éclaire comme en plein jour une large zone de la seine et des deux rives. Les insectes, oiseaux, amphibiens et poissons sont particulièrement affectés.
Nos préconisations
- Le RLPI doit traiter de toutes les enseignes lumineuses numériques. La réglementation doit évoluer sur ce point. Inscrire les autorisations relevant des pouvoirs du Maire / affichages, enseignes & autres installations, en cohérence avec les principes édictés dans le RLPI (ex. locaux temporaires / promotion immobilière).
- Le fait que les éco-quartiers qui sont exempts de publicité pour éviter la pollution visuelle comme celui du fort d’Issy-les-Moulineaux, devrait être un modèle à généraliser pour l’avenir.
- Restreindre fortement, voire supprimer, les publicités lumineuses (dont numériques) de taille 4 x 3 m2 en fixant des obligations & modalités formelles d’extinction des-dites publicités en conséquence. L’allongement de la période d’extinction de 22 h à 7 h est un minimum.
- Les enseignes lumineuses des abribus doivent être éteintes à la fin du service
- Bannir le rétro-éclairage des bâches publicitaires sur les chantiers ou les immeubles.
- Supprimer l’écran lumineux numérique de 800 m2 de la Seine Musicale.
- Interdire tous les affichages rétro-éclairés par halogènes
- Ne pas autoriser les marquages publicitaires éphémères sur les trottoirs
- Maintenir la protection, déjà requise par la réglementation actuelle, des secteurs d’habitat résidentiel et du centre urbain en y restreignant les possibilités de publicité sur les propriétés privées
- Incidemment, privilégier la présence publicitaire dans les zones d’activités et sur les axes structurants (N10) tout en réduisant son impact paysager par des restrictions de nombre et de format
- Pour les communes qui doivent renouveler leur mobilier urbain, les préconisations ci-dessus s’appliquent même si les règlements de publicité locaux anciens ou récents existent et sont pour certains assez protecteurs. En plus, il faut que l’ile Seguin devienne un site protégé pour le mobilier urbain publicitaire.
Le 18 mai 2018,
Irène Nenner, Présidente